lundi 29 avril 2019

Quel est votre style de médiateur?

Par Jean Poitras, Ph.D.

Dans une recherche classique sur le processus de médiation, Deborah Kolb a identifié deux styles prédominants de médiateurs. Le médiateur de style « chef d'orchestre » cherche avant tout à faciliter les discussions. À l'opposé, nous retrouvons le médiateur au style « interventionniste » qui s'implique activement dans la recherche d'une entente. Chacun de ces deux styles de médiation présente des avantages et des inconvénients. Bien entendu, ces styles constituent deux pôles et les médiateurs se retrouveront généralement entre ces extrêmes. Dans cette perspective, la notion de style ne doit pas être considérée comme un trait de caractère, mais plutôt comme une tendance naturelle.

Le style chef d'orchestre. Le médiateur adoptant ce style a une approche plutôt passive quant à la direction des négociations. Il centre son intervention sur l'encadrement des discussions et encourage la recherche de solutions communes. Cependant, il ne prend pas part directement à la recherche de solution. Par exemple, il ne proposera pas des compromis aux parties, même si elles ne peuvent en concevoir par elles-mêmes. Le médiateur « chef d'orchestre » laisse donc beaucoup de liberté aux parties pour formuler elles-mêmes leur entente, et ce, à leur rythme. Ce style d'intervention est propice à l'établissement d'un climat de collaboration entre les parties.  Pour le médiateur « chef d'orchestre », son rôle consiste à appuyer les discussions tout en laissant la responsabilité aux parties de trouver une solution.

Le style interventionniste. En plus d'encadrer les négociations, le médiateur adoptant ce style s'implique activement dans les négociations. Il dirige généralement les discussions et peut aussi faire des suggestions de compromis. Par exemple, il n'hésitera pas à couper les conversations improductives entre les parties. Tout en demeurant impartial, il peut même chercher à inciter les parties à faire des concessions. Le médiateur « interventionniste » voit son rôle comme étant de trouver une solution, quitte à forcer le pas aux parties. Ce style est efficace en situation de crise, où les parties doivent trouver rapidement une solution pour débloquer une impasse. Dans ces circonstances, une intervention un peu plus musclée de la part du médiateur peut être alors appropriée.

Peut-on dire qu'un style est supérieur à l'autre? On pourrait croire à première vue qu'un médiateur interventionniste apparaîtra aux parties comme étant parfois biaisé. De même, la non ingérence du médiateur chef d'orchestre pourrait laisser croire qu'il sera moins efficace pour provoquer un compromis. Or les recherches ont démontré qu'aucun des styles n'est associé à une perception d'impartialité ni à un taux de succès supérieur. En fait, la meilleure approche pour un médiateur est de gérer les attentes des parties en expliquant son style et comment il a l'intention de procéder durant la médiation. 

En conclusion, l'expérience clinique démontre que les deux styles sont utiles selon les circonstances. Un problème apparaît lorsqu'un médiateur est incapable de passer d'un style à l'autre selon les besoins de la dynamique entre les parties ou encore selon le contexte du conflit. Bien que l'on puisse être naturellement plus confortable avec un des deux styles, on pourrait donc dire que le meilleur style est le style «polyvalent»!


Référence
  • KOLB, Deborah M. Roles mediators play: State and federal practice. Industrial Relations: A Journal of Economy and Society, 1981, vol. 20, no 1, p. 1-17.
  • KOLB, Deborah M. Strategy and the tactics of mediation. Human Relations, 1983, vol. 36, no 3, p. 247-268.

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