dimanche 8 février 2015

Une Politique sur le harcèlement doit-elle être nécessairement complexe?

Par Frédéric Moisan, Ph.D., CRHA

Depuis l’entrée en vigueur des dispositions sur le harcèlement psychologique de la Loi sur les normes du travail en juin 2004, on a vu une véritable multiplication des guides pratiques destinés aux employeurs. Les modèles de politiques présentés dans plusieurs de ces ouvrages possèdent souvent de nombreuses sections et peuvent ainsi paraître très complexes à développer et à mettre en œuvre, en particulier pour les organisations de petite taille. Ainsi, un sondage de la Commission des normes du travail révélait que seulement 40% des moyennes entreprises et à peine 15 % des petites entreprises possédaient une politique en matière de harcèlement. La complexité apparente de développer une politique sur le harcèlement expliquerait-elle ces résultats?

Si c'est le cas, c'est dommage. En effet, une bonne politique n’a cependant pas besoin d’être compliquée pour s’avérer efficace. Les recherches ont mis en lumière quatre éléments essentiels à toute bonne politique en matière de harcèlement :
  • Une déclaration explicite que le harcèlement n'est pas toléré
  • Des précisions concernant les comportements désirés et inacceptables dans l’entreprise
  • Une procédure de traitement des plaintes
  • Des mesures auxquelles s’exposent les employés qui contreviennent à la politique

Premièrement, la déclaration de non-tolérance au harcèlement correspond à un engagement formel de l’employeur de promouvoir des relations cordiales et respectueuses auprès des employés dans le cadre du travail. Ensuite, en plus de fournir une définition du harcèlement, l’employeur doit préciser des exemples spécifiques et concrets des comportements désirés et inacceptables afin de les faire comprendre au personnel. Idéalement, ceux-ci doivent être adaptés au contexte de travail de l’entreprise. En troisième lieu, la procédure de traitement des plaintes doit spécifier les différentes mesures disponibles – en général, essentiellement la médiation et l’enquête – ainsi qu’identifier les personnes ou les niveaux dans l’entreprise qui sont responsables de leur déroulement. Enfin, la politique doit prévoir des mesures correctives, soit disciplinaires ou administratives, en précisant que celles-ci seront imposées en fonction des règles de proportionnalité par rapport à la faute et de gradation des sanctions.

Ainsi, une politique organisationnelle toute simple peut s’avérer efficace si elle répond à ces quatre critères. Pour les plus petites entreprises, cet engagement écrit de l’employeur peut même contenir en seulement quelques pages. En fait, l'important est qu'une politique doit être diffusée aux employés et appliquée. De plus, le fait d’appliquer la politique de façon cohérente permet d’améliorer sa crédibilité auprès de l'ensemble des employés. Dans cette perspective, un politique simple à communiquer et à mettre en œuvre est un atout.
Évidemment, nous ne recommandons pas d'utiliser des politiques simplistes. L'idée est que des entreprises avec peu de moyen peuvent se doter d'une politique concise et appropriée pour prévenir le harcèlement psychologique. De plus, certaines politiques complexes auraient peut-être avantage à être épurées. Comme le dit le dicton anglophone : small is beautiful!

Références
  • COMMISSION DES NORMES DU TRAVAIL. Étude sur les obligations des entreprises face au harcèlement psychologique au travail – rapport d'analyse, 2010.
  • VEGA, Gina, et COMER, Debra R. Sticks and Stones may Break Your Bones, but Words can Break Your Spirit: Bullying in the Workplace. Journal of Business Ethics, 2005, vol. 58, no 1-3, p. 101-109.
  • WOLLAN, Melody. Strategies for Managers in Handling Workplace Bullying. Bullying in the Workplace: Causes, Symptoms, and Remedies, 2013, p. 271-289.


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