mardi 11 mars 2008

Développer une culture organisationnelle de réconciliation des intérêts

Par Jean Poitras, Ph.D.

Pour atténuer le climat conflictuel ou encore prévenir l'apparition de nouveaux conflits, une organisation peut envisager d’adopter un style de gestion axé sur la réconciliation des intérêts. On ne parle pas ici de régler les conflits à la pièce, mais d'instaurer des mécanismes ou encore des habitudes qui désamorcent les situations potentiellement conflictuelle avant que celles-ci ne dégénèrent.  À cet effet, trois stratégies pour développer une culture de réconciliation des intérêts sont particulièrement intéressantes.


Politique de porte ouverte. Une première stratégie est d’adopter une politique de porte ouverte. Les gestionnaires privilégient alors le dialogue avec leurs employés et encouragent ceux-ci à discuter ouvertement des situations conflictuelles avec eux. Certaines études suggèrent qu’une politique de porte ouverte peut régler jusqu’à 90 % des problèmes. Cependant, le succès d’une politique de porte ouverte dépend notamment de la compétence des gestionnaires en gestion des conflits. En effet, il est approprié de combiner cette approche à une pratique de « coaching » en gestion des conflits.

Dans cette perspective, l’un des rôles importants du gestionnaire est de développer ses habiletés à conseiller et guider ses employés dans une démarche de règlement de leurs différends. Il s’agit alors d’aider les personnes à se rendre au cœur du problème et à établir les irritants dans leur relation avec l’autre. Ensuite, des stratégies visant à mieux approcher l’autre et à aborder le problème sont proposées pour guider l’employé en difficulté. Ainsi, le gestionnaire contribuera à l’autonomisation des employés en ce qui a trait à la gestion des conflits en milieu de travail.

Médiation par les gestionnaires. Parfois, les gestionnaires devront jouer un rôle plus actif pour dénouer une situation conflictuelle. Il y a plusieurs raisons pour lesquelles les parties seront incapables de régler leurs différends par elles-mêmes : conflit ayant un trop long historique, conflit ayant une base émotive trop forte, habiletés de résolution des conflits limitées, etc. Dans ces situations, la stratégie d’intervention proposée en est une de médiation par les gestionnaires. Selon cette approche, le gestionnaire aide ses employés en conflit à trouver eux-mêmes une solution à leur problème en tenant un rôle de facilitateur « neutre » des discussions.

Ainsi, pour résoudre rapidement les conflits, promouvoir un climat de consensus et maintenir de bonnes relations entre les employés, il est important que le gestionnaire possède certaines habiletés de médiateur. Le gestionnaire encadre les discussions des employés en conflit pour les aider à déterminer leurs priorités et les encourage à trouver des moyens pour que tous y trouvent leur compte, y compris l’organisation. De plus, en agissant comme médiateur, le gestionnaire atténue les tensions et l’anxiété qui empêchent les parties d’aborder le problème de façon rationnelle. La nécessité pour les gestionnaires d’intervenir pour régler les conflits est une tendance lourde. Une récente étude a d’ailleurs démontré que l’habileté des gestionnaires à dénouer les impasses est un facteur important de l’évaluation du potentiel de promotion de ceux-ci.

Développement des compétences. Une troisième stratégie consiste à développer les habiletés de négociation des employés, notamment en ce qui concerne la négociation axée sur les intérêts. Il s’agit alors de négocier en se centrant sur les besoins et les intérêts plutôt que sur les prises de position et les guerres personnelles. En outillant les employés à mieux négocier avec leurs collègues, cette approche favorise également l’autonomisation de ceux-ci. Elle encourage également un changement de culture interactionnelle, à la base de l’organisation.

Développer les habiletés de négociation de ses employés peut permettre de réduire les coûts de gestion des conflits, améliorer les relations entre les employés, accroître la souplesse au travail et ainsi augmenter les profits et se doter d’un avantage concurrentiel. En effet, les employés ayant de meilleures habiletés de négociation pourront plus facilement régler les petits conflits qui nuisent à la productivité tout en optant pour une approche de résolution de problème quand vient le temps de discuter des changements nécessaires à la réalisation des tâches et à l’amélioration de l’efficacité organisationnelle.

Somme toute, les avantages de développer une culture organisationnelle de réconciliation des intérêts sont nombreux. D’abord, la capacité d’une organisation de régler efficacement ses conflits est un élément clé de son efficacité organisationnelle. De plus, la création et le maintien d’un climat de travail collégial est l’une des quatre principales contributions des ressources humaines à la création de valeur pour une organisation. C’est dans cette optique que l’intégration de mécanisme de gestion des conflits prend toute son importance stratégique.


Référence
  • AMSLER, Lisa Blomgren, MARTINEZ, Janet K., et SMITH, Stephanie E. Christina Merchant and the state of dispute system design. Conflict Resolution Quarterly, 2015, vol. 33, no S1.
  • POITRAS, Jean et LE TAREAU, Aurélia. Dispute resolution patterns and organizational dispute states. International Journal of Conflict Management, 2008, vol. 19, no 1, p. 72-87.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

I could not resist commenting. Well written!