samedi 16 mai 2015

Les équipes multiculturelles sont-elles plus propices aux conflits?

Par Louis-Charles Monast

Dans un pays donné, les habitants partagent sensiblement tous la même culture. Par contre, plus on s’approche d’une métropole, comme Montréal, plus on est en présence de personnes d’origines différentes et de cultures diverses. De plus, avec le phénomène de la mondialisation, les entreprises d’aujourd’hui doivent maitriser ces différences et les faire tourner à leur avantage afin de performer. Plusieurs études ont déjà porté sur le sujet de la diversité et de ses bénéfices et ses inconvénients pour une organisation. Cependant, qu’en est-il de son influence sur le travail d’équipe et les conflits?

Selon Hofstede (2003), il existe cinq grandes dimensions sur lesquelles on peut comparer les sociétés d’aujourd’hui :
  • La tolérance du déséquilibre du pouvoir
  • L’individualisme/collectivisme
  • La masculinité/féminité
  • La tolérance à l’incertitude
  • L’orientation à court ou à long terme

Toutes ces dimensions influencent grandement les perceptions, les valeurs et les comportements d’une personne. Ainsi, dans une équipe diversifiée, les coéquipiers peuvent avoir des croyances différentes à propos du fonctionnement du groupe, notamment en ce qui concerne le leadership intra-équipe, la notion de pouvoir, la communication ainsi que la vision des conflits. Par exemple, un individu provenant d’un pays où il existe une faible distanciation du pouvoir n’accordera pas la même valeur à la position hiérarchique au sein de l'équipe que son collègue qui provient d’une culture où le rang revêt une grande importance. Ces différences sont souvent bien moins apparentes à première vue que celles qui existent entre le langage ou l’apparence physique. C’est cependant cette subtilité qui fait que l’on n’y porte pas assez d’attention.
Qui plus est, une équipe multiculturelle a un risque accru de polarisation des membres en cas de conflits. En effet, on a toujours tendance à aller vers les personnes qui nous ressemblent. Dans une équipe, la diversité peut donc amener un scindement du groupe en plusieurs plus petits. Cette situation peut devenir conflictuelle puisqu’alors, les membres s’identifient davantage à leur sous-groupe qu’au tout qu’ils constituent. Ainsi, on peut voir apparaître des conflits entre les différents sous-groupes pour différentes ressources ou pour plus de pouvoir. De plus, si ces groupes sont composés de gens de cultures différentes, de banales divergences peuvent prendre une tournure dévastatrice et escalader rapidement si les acteurs de ce conflit y associent une composante symbolique, telle que le racisme.
Un tiers facilitateur peut être très utile aux équipes multiculturelles afin d'éviter ces problèmes. En effet, en prenant connaissance des différences culturelles qui existent au sein du groupe, le facilitateur peut expliciter ces différences et aider le groupe à mieux fonctionner avec cette réalité. De plus, il peut favoriser un dialogue productif en établissant des normes de communication de groupe. Il peut également gérer les dynamiques de pouvoir au sein du groupe, notamment favorisant une discussion sur les attentes des membres. Enfin, en présence de sous-groupe, il peut s’assurer de rapprocher les leaders informels afin de bâtir une relation de confiance entre eux et par extension entre les groupes. Ainsi, avec des interventions de cohésion d’équipe et de partage entre les diverses cultures, le facilitateur peut humaniser les membres d'un groupe, limiter les biais et éviter une polarisation des membres.
En conclusion, nos perceptions et nos croyances sont teintées par notre culture et il est important de tenir compte que la personne en face de nous ne partagent pas nécessairement les mêmes. Il serait facile de mal interpréter les intentions de l’autre et de provoquer un conflit si on s’arrête à nos propres impressions. Ainsi, la prochaine fois que vous aurez à travailler en équipe, soyez plus conscient de ces aspects, car comme le disait l'écrivaine Anaïs Nin : «Nous ne voyons pas les choses comme elles sont. Nous les voyons comme nous sommes.»

Références
  • Hofstede, G. (2003). Culture’s consequences: Comparing values, behaviors, institutions and organizations across nations (2nd Ed.) Thousand Oaks, CA:Sage
  • Scheffert, D. R. et Laeger-Hagemeister, M. (2010). Facilitating Multicultural groups. The Handbook for working with difficult groups. Jossey-Bass, p. 55-76

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