lundi 16 mars 2015

Médiateurs : Et si c'était vous le problème?

par Louis-Charles Monast

Parfois, un conflit peut être très difficile à résoudre. Certains problèmes sont complexes et offrent peu de place aux compromis. Dans d'autres cas, une partie est particulièrement difficile, voire de mauvaise foi. C'est pourquoi on recommande souvent de faire appel à un tiers neutre pour aider les parties à résoudre leur problème. Mais les recherches démontrent que l'aide externe n'est pas toujours bénéfique! En effet, dans certains cas, c'est le médiateur qui est responsable du blocage et ce, à son insu. Comment expliquer que de l'aide bien intentionnée peut s'avérer nuisible?
 
À la base, un médiateur peut commettre une erreur lorsque celui-ci néglige ou n'est pas conscient de l'une des dimensions importantes d'un conflit. On peut diviser les erreurs de médiation en trois types :

  1. Le mauvais choix de stratégie
  2. Les réactions défensives exagérées
  3. La mauvaise gestion de la relation de pouvoir
 
D'abord, chaque stratégie de médiation doit être adaptée au problème sous-jacent au conflit. Une mauvaise lecture de la situation conflictuelle peut donc amener un médiateur à choisir une stratégie peu appropriée. Non seulement une mauvaise stratégie ne débloque généralement pas le conflit, mais elle peut ouvrir «un nouveau front» et complexifier la résolution. Choisir une stratégie sans bien comprendre sa logique d'utilisation diminue l’efficacité de l'intervention et limite également l'ajustement de celle-ci aux besoins de la situation.
 
Ensuite, l'efficacité et la performance d'un médiateur sont fortement influencées par son habileté à demeurer attentif, ouvert et authentique avec les parties afin de leur offrir le support approprié. Ainsi, le médiateur ne doit pas se laisser distraire par les paroles ou comportements inappropriés des participants, car autrement, il risque d'être aspiré par la dynamique du conflit. Il pourrait alors tenter d'imposer ses perceptions aux parties. Un médiateur doit donc apprendre à se connaître et éviter de s'emporter. Autrement, il risque de perdre le contrôle de son intervention auprès du groupe.
 
Finalement, de par son rôle, le médiateur est garant d'une discussion égalitaire entre les parties. Ainsi, les facilitateurs doivent être conscients des jeux de pouvoir et viser à modérer l'impact de ceux-ci. Un bon facilitateur devrait être engagé dans l’empowerement des parties plus faibles ou marginalisées afin de leur permettre de faire valoir pleinement leur point de vue. Lorsque le médiateur ne tient pas compte de ces relations de pouvoir, il peut alors contribuer à maintenir des abus par certaines parties au détriment des autres qui se sentent alors frustrées.

En gardant ces trois écueils en tête lors de vos prochaines interventions, vous serez sûr de contribuer à la résolution du conflit plutôt que de provoquer son escalade. Toutefois, même les meilleurs médiateurs font parfois des erreurs et la plupart pourraient sûrement vous raconter des anecdotes associées à des mauvais choix d'intervention. Mais comme le dit George Bernard Shaw : «Le succès ne consiste pas à ne jamais faire d'erreur, mais à ne jamais faire la même deux fois». Mais encore faut-il s'être aperçu d'avoir fait une erreur...

Références
  • Thomas, G. (2010). «Difficult groups or difficult facilitators? Three steps facilitators can take to make sure they are not the problem». The handbook for working with difficult groups, Jossey-Bass p. 339-352
  • Ringer, M. (2002). «Group action: the dynamics of groups in therapeutic, educational and corporate setting». Kingsley, London.
  • Schwarz, R (2005). «The skilled facilitator approach». The skilled facilitator fieldbook: Tips. Tools and tested methods for consultants, facilitators, managers, trainers and coaches. Jossey-Bass, San Francisco.

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