Ah les employés problématiques! Vous êtes agacés par leurs attitudes, mais vous craignez d’empirer la situation en leur faisant part de votre insatisfaction. Vous montrez des signes d’impatience lorsqu’ils se retrouvent dans votre bureau encore une fois pour se plaindre d’un collègue ou parce qu’un superviseur intermédiaire vient de leur servir une mesure disciplinaire. Pourtant, ils ne semblent faire aucuns liens entre votre résistance non verbale et leurs propres attitudes. Il faut donc faire quelque chose et vous avez l’intention de mettre les choses au clair. Mais vous hésitez, car vous savez bien que la conversation sera difficile, et qu’il sera délicat de ne pas s’engager dans une situation conflictuelle.
Dans une conversation portant sur un sujet délicat, trois discussions distinctes ont cours de façon simultanée : a) la discussion portant sur les faits, b) la discussion révélant la dimension émotive sous-jacente et c) la discussion se déroulant à l’intérieur de chacune des parties en cause.
La discussion factuelle vous invite d’abord et avant tout à distinguer la personne du problème. Vous n’avez pas les compétences pour faire une évaluation de la personnalité; vous devrez donc vous limiter à l’observation et à la description des comportements. Vous devrez également être disposé à dialoguer avec cet employé et écouter sa perspective pour tenter de comprendre les appréhensions et intentions qui sous-tendent ses comportements. Dans un premier temps, cette réserve va permettre de lui démontrer que sa personne et la situation vous importent tout autant. Ensuite, elle vous permettra de demeurer relativement objectif et d’éviter de placer votre orgueil sur la ligne de feu, ce qui ne ferait qu’y ajouter de l’huile.
Avec la discussion émotive, la personne communique beaucoup d’émotions et probablement un certain niveau d’hostilité. En fait, il se peut que vous en viviez vous-mêmes de manière assez vive. Vous devez donc chercher à saisir ce qui peut bien se cacher en dessous et à traduire ces émotions en intérêts ou besoins qui n’ont pas encore été satisfaits dans le milieu de travail; il devient en effet important de nommer précisément ces besoins de manière à faire avancer le règlement de la situation. Ces intérêts, intégrés aux besoins organisationnels que vous continuerez à lui communiquer, font partie intégrante du terrain d’entente que vous cherchez à établir avec l’employé afin d’aplanir les difficultés dans le cadre d’un partenariat efficace avec lui.
Finalement, avec la discussion intérieure, c’est votre propre identité qui est secouée. Vous devez donc vous imposer un peu de recul pour réfléchir à l’impact des difficultés relationnelles que vous éprouvez avec cette personne et aux valeurs qui sont alors remises en cause pour vous. Il s’agit d’une excellente opportunité d’avancer sur le chemin de la conscience et de la connaissance de soi que doit emprunter tout gestionnaire afin de mieux situer son action auprès de ses employés. Vous serez peut-être alors plus aptes à admettre certaines erreurs ou à lui faire part des difficultés et effets identifiés, avec courage, transparence et pertinence, grâce à un dialogue senti, respectueux et ouvert à l’apprentissage.
Somme toute, le succès d’une conversation abordant un sujet délicat dépend de la maîtrise des trois niveaux de communication qui se déroulent en même temps. Sinon, l’échange demeurera confus et ne réussira pas à cibler les améliorations nécessaires; il pourra même se révéler propice à l’éclosion, au développement ou au maintien d’un conflit relationnel.
© Publié par Fernand Bélair le 5 mars 2007.
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