mardi 28 février 2012

Le Médiateur : un facilitateur et un leader?

Par Jean Poitras, Ph.D.

Dans la littérature portant sur la médiation, le médiateur est décrit comme un tiers neutre qui facilite les discussions. Celui-ci n’a pas la responsabilité de trouver une solution, mais gère le processus de médiation. Et si le médiateur n’était pas qu’un facilitateur, mais aussi un leader? Un article de Ran Kuttner pose la question et propose d’intégrer des stratégies de leadership au processus de médiation.

Ainsi, selon la théorie du leadership adaptatif, les médiateurs devraient dans un premier temps exposer clairement aux parties les défis personnels qu’elles devront relever pour régler le conflit. Les défis prennent souvent la forme d’adaptation à la réalité post-conflictuelle. Par exemple, dans le cas d’une médiation suite à un congédiement, un employé peut « espérer » retrouver son emploi. Si ce n’est pas une option, le médiateur devrait souligner le défi que représente l’acceptation de ce fait ainsi que le stress associé à la recherche d’un nouvel emploi.

Dans un deuxième temps, les médiateurs devraient supporter les parties dans leur effort d’adaptation aux défis identifiés. L’aide prend la forme de support moral et surtout de support stratégique en s’assurant que les négociations reflètent les défis des parties. En poursuivant l’exemple précédent, le médiateur devrait dresser une liste des besoins qui pourrait faciliter l’adaptation de cette partie à sa nouvelle situation et s’assurer que ces éléments sont intégrés dans la négociation. Par exemple, est-ce que la partie a pensé à ses besoins de formation ou encore à une lettre de référence ?

Évidemment, le médiateur aide les parties à identifier leurs besoins peut importe s’il adopte ou non un rôle de leader. Cependant, selon Ran Kuttner, lorsque le médiateur adopte un rôle de leader, celui-ci est plus proactif dans l’identification des besoins. Ainsi, le médiateur-leader peut aller jusqu’à suggérer des besoins à considérer s’il croit que ceux-ci sont nécessaires à l’adaptation des parties à la situation post-conflictuelle. C’est d’autant plus important que les parties sont parfois dépassées par les défis d’adaptation et qu’elles n’ont pas nécessairement une idée claire de ce dont elles ont besoin pour s’adapter.

Le concept de médiateur-leader est intéressant, mais il ouvre une discussion importante sur la neutralité de celui-ci. À partir de quand le médiateur passe d’un rôle de leader à celui d’un activiste pro-partie? Malheureusement, l’auteur n’aborde pas cette question.


Référence
  • Kuttner, R. 2012. «Conflict specialists as leaders : revisiting the role of the conflict spacialist from a leadership perspective». Conflict Resolution Quarterly, 29 (2), p. 103-126.

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